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La Zone de libre-échange, une opportunité d’affai

Interview avec Treasure MAPHANGA, Directrice du Département Commerce et Industrie de l’Union Africaine

 

« La Zone de libre-échange, une opportunité d’affaires pour les secteurs privés africains »

 

Plus de cinq décennies après sa création l’Union Africaine (une mutation de l’OUA) peine à concrétiser tous les instruments de son intégration continentale. Les Etats-membres veulent désormais aller plus vite pour augmenter de façon notable d’ici à 2020 le niveau d’échanges intra-africains observé aujourd’hui, soit 12 pour cent. La Directrice du Département Commerce et Industrie de l’Union Africaine expose ici les motivations de l’initiative de la zone de libre-échange.

 

Alex SANOU

La ZLEC (zone de libre-échange continentale) est une grande ambition, mais pensez-vous que les Etats sont assez engagés dans le sens voulu ?

 

Ce sont les Etats eux-mêmes qui ont pris la décision de créer cette zone de libre-échange après de nombreux débats, donc ils sont très engagés. Au niveau de l’Union Africaine, nous avons organisé plusieurs rencontres d’information et d’explication. Nous espérons pouvoir obtenir le soutien et la participation active de chaque Etat-membre.

 

La Zone de libre-échange pourra-t-elle être prête pour 2017 ?

 

Le délai de 2017 est une date indicative mais la réalité, c’est que le projet est très grand. Pour l’heure, engageons le processus. Si en cours de négociation nous constatons après qu’on a besoin de plus de temps, nous ferons la proposition aux chefs d’Etat. Nous avons au plus dix-huit mois devant nous, et nous devons tout faire pour relever le défi à l’échelle continentale. N’oubliez pas qu’au niveau des Communautés Economiques Régionales, beaucoup de travail est fait pour consolider l’intégration. L’exemple de la CEDEAO (ndlr : Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) est frappant. Cette région a déjà adopté un Tarif extérieur commun, et je pense que c’est possible de le faire avec les autres CER du continent dans le cadre du processus d’intégration.

 

De grands pays tels que l’Algérie, l’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Egypte ou encore le Kenya ne seraient pas favorables à ce projet. Qu’en est-il exactement ?

 

Nous travaillons étroitement avec tous les Etats que vous avez mentionnés. A aucun moment nous n’avons observé de réticence de la part de leurs délégations aux différentes réunions que nous organisons. Ce qu’il faut noter et apprécier, c’est que cette Zone de libre-échange constitue une véritable opportunité pour les pays notamment pour les secteurs privés respectifs en termes d’agrandissement des marchés. Désormais, les entrepreneurs et autres hommes d’affaires devront penser région ou continent au lieu de marché national comme ils l’ont fait jusqu’à présent. C’est une occasion pour eux de faire prospérer leurs affaires à travers une Afrique unie. Il faudra cependant penser aux réajustements éventuels pour chaque pays le moment venu. Il ne faudra pas penser en termes de pays gagnants ou de perdants dans ce processus d’intégration africaine. Il y aura solidarité, équité et complémentarité. Si nous réussissons ce processus d’intégration, l’Afrique en tant que continent trouvera ainsi la voie de son développement que nous pourrons ensuite léguer à nos enfants et à nos petits-enfants.

Sécurité alimentaire: l’UEMOA se dote d’un program

Sécurité alimentaire: l’UEMOA se dote d’un programme décennal

 

Les huit pays de l’Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) se donnent les moyens pour améliorer la situation de la sécurité alimentaire dans la sous-région.

 

Ben Kouassi

Les prévisions agricoles ne sont pas alarmantes dans les pays de l’UEMOA, même si les efforts méritent d’être déployés pour éviter quelques surprises. C’est l’une des observations de la cinquième réunion du Comité de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire dans l’espace UEMOA (CHNSA), tenue le lundi 23 mars 2015 à Niamey au Niger. Le Comité a annoncé que « la situation agricole 2014-2015 fait ressortir un niveau de récoltes globalement satisfaisantes avec une production prévisionnelle de plus de 23 millions de tonnes de céréales et environ 19 millions de tonnes de tubercules ». Le communiqué final qui a sanctionné la réunion de Niamey nuance : « Toutefois, la situation alimentaire et nutritionnelle reste préoccupante dans certaines zones, notamment en Guinée-Bissau, au Niger et au Sénégal. »

Les difficultés agricoles de la sous-région liées à plusieurs facteurs (sanitaires, climatiques, politiques, etc.) seront désormais mieux cernées et les solutions idoines appliquées grâce à la mise en place du Programme Communautaire Décennal de Transformation de l’Agriculture pour la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (PCD-TASAN). Ce Programme a été validé et adopté à la réunion du CHNSA placée sous l’égide du président nigérien  Issoufou MAHAMADOU, président dudit Comité, en présence notamment du Commissaire de la CEDEAO chargé de l’agriculture, de l’environnement et des ressources en eau, de l’Envoyé Spécial du Directeur Général de la FAO pour le Sahel et la Corne de l’Afrique, ainsi que du Directeur du Secrétariat du Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest.

« Le coût global de mise en œuvre est estimé à 689 milliards FCFA que l’Union compte mobiliser dans le cadre du Partenariat public-privé », note le communiqué.

Le CHNSA a été mis en place par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’UEMOA. Présidé par le chef de l’Etat nigérien, sa mission principale est d’identifier les voies adaptées pour promouvoir la transformation durable de l’agriculture dans l’Union. Outre les Ministres de l’agriculture et de l’élevage des Etats, le Comité réunit le Président de la Commission, le Gouverneur de la BCEAO, le Président de la BOAD, le Secrétaire Exécutif du Comité Inter Etats de lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS), les représentants du Système des Nations-Unies (FAO, PNUD, PAM) et des partenaires techniques et financiers (Banque Mondiale, Union Européenne).

Un bâtisseur togolais rafle de nouveaux marchés s

Un bâtisseur  togolais rafle de nouveaux marchés sur le continent

 

Son chiffre d’affaires au cours de l’année 2013 s’élève à 22 milliards soit une croissance de 67 % par rapport à 2012. Numéro un dans le BTP au Togo, la firme Ceco SA voit grand et déploie une réelle stratégie d’implantation avec six filiales solidement armées pour rivaliser avec les multinationales.

 

Emmanuelle Sodji

Dans la banlieue nord de la capitale togolaise, des axes flambants neufs, bordés par des trottoirs arborés, se déploientsur des kilomètres,  balayant les derniers signes anarchiques d’un quartier populairesurgide terre, dans un       enchevêtrement de pistes latéritiques et poussiéreuses. Des feux tricolores, ultra modernes, décomptent le temps aux principales intersections, comme s’il fallait à présent en gagner, après plus d’une décennie d’hibernation économique forcée, pour cause  de  déficit démocratique du pays.

 

C’est dans ce nouveau quartier érigé en un temps record que la firme Ceco SA, numéro un dans le BTP togolais,  a installé sa représentation.Plutôt ingénieux. Le  savoir-faire de l’entreprise s’affiche grandeur nature, au milieu de ce nouvel aménagement urbain. Des centaines d’ouvriers, ordre de mission en main, représentants plusieurs dizaines de métiers, s’apprêtent, sous la vigilance de managers trentenaires, à regagner leurs postes de travail à plusieurs points de la capitale.

 

Un arsenal  de rutilants engins (les niveleuses, les bulldozers, les chargeuses, les pelleteuses, sans compter  des équipements de revêtement et du matériel de transport) étale le leadership professionnel de CecoGroup SA.Après le « petit »Togo qui a vu grandir ses activités  à la vitesse d’un éclair, d’abord  au sein, il y a 10 ans, d’une organisation non gouvernementale pour devenir une holding en 2013, le maître-bâtisseur, Constantin Amouzou, voit aujourd’hui  plus grand. Le patron de Ceco Group SA se lance un nouveau défi : gagner de nouveaux marchés sur le continent africain.

 

Bien évidemment, partir à la  « conquête de l’Ouest » africain, ne se décrète pas d’un coup de baguette magique, mais suppose une réelle stratégie  d’implantation.  Même si le pedigree de l’entreprise se présente  en « béton armé »- un équipement qui n’a rien à envier aux autres grandes firmes internationales etun capital humain dynamique et qualifié, Ceco Groupa  opté pour un démarrage en douceur,  à pas feutrés  dans la sous-région.  « En Côte d’Ivoire, au Ghana,  au Liberia, au Niger, en Guinée et même en Tanzanie, nous avons commencé par des missions de prospection, ensuite nous nous sommes installés, soit par voie directe, soit par le jeu d’alliance», déclare Ben Amouzou, le directeur du Développement international.

 

L’entreprise relève le défi, lentement mais sûrement, dans la plupart des pays où l’on assiste à un boom de l’industrie de construction.« Partout, sans exception, les règles du jeu sont quasi-identiques. Dès que l’autorité centrale d’un pays engage des efforts pour  démocratiser et rendre plus transparentes les procédures de passation de marchés, la concurrence est évidemment plus rude, plus saine »,ajoute le directeur.En prime : un  marché  public plus ouvert. Les patrons peuvent se frotter les mains. « Une entreprise performante a toutes les chances de remporter un appel d’offres si les critères d’éligibilité sont réellement sélectifs, sans complaisance ni clientélisme »,dit-il, ravi par l’embellie des affaires.

 

En Côte d’Ivoire par exemple, un pays qui se relève progressivement d’une dizaine d’années de blocages politique et économique, l’entreprise togolaiseaffronte une rude concurrence. Mais grâce à la réplication  de son expérience togolaise, une mise à niveau quotidienne de la main d’œuvre et du matériel,  elle résiste… et construit. Ses équipes participent à la réalisation du « Programme présidentiel d’urgence, un habitat pour chaque Ivoirien ». Au total, ce sont  trois mille logements, à Gagnoa et à Songnon, toutes catégories de standing sur lesquels Ceco Group travaille. « Un pays comme la Côte d'Ivoire évidemment n’est  pas  un marché d'accès facile. De nombreuses firmes internationales y sont depuis très longtemps, mais  nous croyons en  nos chances et nous nous accrochons à notre philosophie : finesse, solidité et ponctualité »,insiste le directeur, Ben Amouzou.  

 

 

Hormis ce vaste programme, déjà  en phase d’exécution, bien d’autres sont en incubation. À Monrovia, après la création de Ceco Group de droit libérien, d’importants projets routiers, immobiliers et miniers sont en cours. Des équipements seront bientôt déployés dans ce pays. L’entreprise n’hésite pas à franchir  l’espace francophone, administré par le droit des affaires de l’Ohada.« Le droit  qui régi le marché ouest-africain francophone reste fédérateur des valeurs économiques auxquelles nous sommes habitués. À première vue, cela pourrait sembler être un handicap d'intégration mais, en fin de compte,  ce défi est  surmontable.Une structure de Btp comme la nôtre l’absorbe aisément. Le vrai défi reste la maîtrise de la culture entrepreneuriale du pays et  les moyens de rester compétitifs. Durant chaque phase de prospection, et avant toute décision d’implantation, un diagnostic est  établi sur l'environnement juridique du pays »,ajoute le manager, spécialiste du développement de l’entreprise à l’international.

 

Que de routes et d’ouvrages construits au Togo et dans la sous-région en moins de dix ans ! La petite Ong a eu un destin exceptionnel, laissant la place à un puissant groupe, doté de six filiales, bâti au fil des années et, solidement armé  pour rivaliser avec les multinationales.Son chiffre d’affaires au cours de l’année 2013  s’élève à 22 milliards  soit  une croissance de 67 % par rapport à 2012.

 

De nature réservée, l’homme d’affaires, quadra, n’aime pas évoquer sa réussite mais devient moins disert dès qu’il s’agit de son entreprise. « Nous  avons  fait  le  choix  de  ne  jamais  décevoir  les attentes  de  nos  clients ;  c’est  une  obsession.  Faire toujours plus. Obtenir le maximum de satisfaction auprès d’un client, en termes de qualité, de délai, de solidité des ouvrages,  au  détriment,  quelques  fois,  de  notre  propre avantage  financier  pour  le  fidéliser  et  obtenir  ses recommandations », explique-t-il.

 

Aujourd’hui, c’est l’une des rares entreprises togolaises à avoir la confiance  des banques locales et sous-régionales. D’ailleurs, celles-ci ne se font pas prier pour  préfinancer les marchés obtenus  par le groupe CecoSA. Tout le monde y trouve son compte et même les pouvoirs publics.« L’avantage du préfinancement  pour l’Etat, c’est que la mise en œuvre de ces projets revient moins chère. L’Etat y gagne, négocie les prix, poste par poste, parce qu’on n’est pas dans le cadre de l’appel d’offres mais dans l’entente directe »,explique le patron, Constantin Amouzou.

 

Après, des dizaines de routes, de ponts et de bâtiments publics plus tard, le leader du bâtiment et de travaux publics, rêve de capitales africaines, réhabilitées, à visage humain, grâce à des politiques fortes en matière de logements et d’aménagement urbain. Le roi du Btp a la conviction que la création de centres périphériques pourrait servir de modèles et permettre de résoudre l’épineuse  question  de la construction anarchique.  Avant que cette idée devienne concrète partout en Afrique de l’Ouest et ailleurs sur le continent, le Togo en chantier,  est pour Ceco SA, un champ d’essais et d’expérimentations.   

Immigration : Un bout de Mali en plein Paris

Immigration : Un bout de Mali en plein Paris

 

À la résidence Coallia de Tillier, dans le 12e arrondissement de la capitale française, la vie est aux ambiances africaines, le quotidien rempli  de références Kayes.

 

 

Sergent Markus T.DJAHO

Âgé d’une trentaine d’années, le teint noir foncé, les cheveux hirsutes comme un début de dreadlocks, Moussa tire rageusement sur un mégot finissant. Il se tient à l’écart d’un groupe de jeunes compatriotes maliens qui se passent un brûlot de feuille séchée enveloppée dans du papier-cigarette, laissant exhaler une odeur piquante et une fumée légère.  Le froid qui balaie la capitale française impose à Moussa et à ses co-habitants de la Résidence Coallia de Tillier de se réchauffer ainsi à l’entrée de cette maison à cinq étages (sis rue Claude Tillier dans le 12e arrondissement de Paris) communément appelée « Foyer malien».

 

Il est 17 h 30 minutes ce mercredi et le foyer grouille de monde. «C’est ainsi tous les soirs. Quand nous rentrons du travail, nous nous réchauffons un peu, nous nous retrouvons comme en famille, comme au pays quoi…», confie Moussa avant de se frayer un chemin vers le restaurant social situé au premier étage. « Salamalékoum » par-ci, «Auni Sogoma» par-là. Moussa salue ses compatriotes qui lui répondent avec une grande courtoisie. Le bambara (une des langues du Mali) est de mise. Le français est quasi inexistant.

 

 

«Nous sommes en communauté, nous parlons notre langue ! » lance-t-il, dans un français approximatif. Selon Moussa, la majorité d’entre eux ne parlaient pas français avant leur arrivée dans L’Hexagone. D’ailleurs une salle au rez-de-chaussée abrite une fois par semaine des cours de français pour les résidents qui le désirent. Ils payent pour cela 20 euros par mois (13 000 Francs CFA). Moussa y participe quelquefois.

 

Dans le couloir à gauche se trouve le bureau de James Pacalet. Le responsable de l’hébergement au foyer malien depuis sa réouverture en 2011 explique : «Sur les 210 habitants des studios individuels, 98 % viennent de la région de Kayes au Mali. Une poignée de Magrébins et de Mauritaniens vivent aussi ici. Ils sont tous des hommes (donc aucune femme) et sont des travailleurs migrants exerçant dans la restauration, le ménage, les travaux et assainissement publics. Ils ne sont pas des sans-papiers. Ce sont des personnes qui ont formulé des demandes d’hébergement et grâce à la mairie de Paris, nous les avons accueillies ici. Ils bénéficient d’un studio individuel entièrement équipé et ils versent une redevance forfaitaire mensuelle.»

 

 

Moussa dit payer régulièrement sa redevance mensuelle qui est d’environ 300 euros. « Si tu n’arrives pas à payer à temps, tu en parles avec les responsables et ils trouvent un arrangement », confie-t-il. Le responsable de l’hébergement James Pacalet  confirme que le caractère social de la résidence impose qu’il soit à l’écoute des habitants pour rechercher avec eux des solutions idoines à leurs difficultés.

Avant d’atteindre le restaurant social, Moussa traverse un hall qui tient lieu de marché et de mosquée à la fois. Des tapis et des nattes sont dressés, orientés vers l’Est, et la prière musulmane du soir semble bien s’annoncer. Les aînés, entre la quarantaine et la soixantaine, arborent leurs grands boubous africains flanqués de chéchias, chapelet à la main. Des conversations diverses ont cours, toujours en Bambara. Quelques-uns d’entre eux tiennent de minuscules commerces à même le sol. Ils y vendent des cartes et des recharges téléphoniques, des paquets de cigarettes, de petites agapes, etc. C’est un peu comme le soir au village…

 

Une halte à la boîte aux lettres portant ses nom et numéro de chambre, mais  rien pour Moussa aujourd’hui. À côté, un tableau d’affichage porte un exemplaire du règlement intérieur en 8 articles et des consignes pour éviter l’épidémie d’Ebola. Exemple : « Bien se laver régulièrement les mains à l’eau et au savon. »

 

Un service de médiation sociale existe en effet ici. Il s’occupe de santé, de vieillissement et des cas sociaux. Il répond au slogan « Pour l’insertion, vers l’autonomie », leitmotiv de l’association Coallia (ex- AFTAM)  qui développe des programmes d’hébergement social à travers le monde.  Née en 1962 sous le nom d’association pour l’accueil et la formation des travailleurs migrants, AFTAM, a eu comme premier président Stéphane Hessel (1917-2013). Un émigré d’origine allemande devenu écrivain, activiste, résistant, diplomate et corédacteur de la Déclaration universelle des droits de l’Homme du 10 décembre 1948. Mais pour Moussa cela n’a pas grande importance.

 

Au restaurant, Moussa se dirige vers Maria, une Magrébine souriante et accueillante, qui y travaille depuis deux ans. « Nous sommes douze pour la cuisine et le restaurant, et tout se passe bien. Nous offrons  du couscous, du riz avec les sauces mafé, tomate, légumes, du poulet, des frites, etc.», explique Maria.  Le restaurant social est ouvert de 11 h à 18 h tous les jours, et les coûts des repas varient entre 2 et 4 euros. Environs 250 repas y sont servis par jour, même à des personnes qui habitent en dehors du foyer. Moussa se fait servir donc un bon plat de riz chaud. Il l’assaisonne d’oignons et de piment. Il accompagne le tout d’un pot de dégué bien frais en guise de dessert. Autour, sur les autres tables, on mange, on discute… parfois à haute voix.

Les APE : quels impacts sur l’intégration régionale de l’Afrique ?

 

Après plus de 12 ans de discussions, trois des cinq groupes de négociation africains,  à savoir la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Communauté de développement d’Afrique Australe (SADC) et la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) ont  conclu des accords de partenariat économique (APE) avec l’Union européenne (UE).

 

Simon Mevel, Giovanni Valensisi, Stephen Karingi* (Revue Volume 15 - Number 5)

Anchor 15

Article mis en ligne le 05/01/2015

L’accélération du processus de la signature des APE fait suite à la date butoir du 1er octobre 2014, fixée unilatéralement par l’UE pour le retrait d’une réglementation sur  l’accès au marché « MAR 1528/2007 », et la menace qui en découle pour les pays africains non-PMA, de voir la suppression partielle ou totale de leur accès préférentiel au marché de l’UE, si les négociations sur les APE ne sont pas conclues. A ce stade, les négociations se poursuivent toujours dans les deux blocs restants de l’Afrique centrale, et de l’Afrique orientale et australe ; cependant, un certain nombre de pays de ces deux groupes a déjà signé des APE intérimaires.

 

Le passage des arrangements préférentiels à un accord réciproque  - bien qu’asymétrique -  compatible avec l’OMC tel que les APE, a traditionnellement soulevé de nombreuses préoccupations, notamment son impact potentiel sur l’intégration régionale et les perspectives de développement de l’Afrique. Ces questions sont d’autant plus pertinentes dans le contexte actuel marqué par l’accélération du processus en vue de l’établissement d’une zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) d’ici 2017. Dans cette optique, et en réponse aux sollicitations de plusieurs parties prenantes, une étude empirique du Centre de la politique commerciale africaine de la CEA jette un nouvel éclairage sur ces questions en se concentrant sur les régions de l’Afrique de l’Ouest, de l’Afrique orientale et australe (CEA, 2014).

Les APE : Quels enjeux ?

 

Tout comme les autres accords commerciaux, l’impact des APE repose essentiellement sur l’interaction de deux principaux éléments : les modifications tarifaires convenues par les deux parties et les aspects structurels des relations commerciales entre les pays africains et l’UE. Concernant le premier élément, la réforme du Système généralisé de préférences (SGP : Réglementation européenne 978/2012) s’articule autour des régimes suivants :

 

  • l’initiative Tout sauf les armes : elle offre un accès au marché en franchise de droits et sans contingents à tous les produits en provenance des PMA, à l’exception des armes et des munitions ;

  • le Système Généralisé de Préférences (SGP) : disponible pour 41 pays à faible revenu et à revenu intermédiaire tranche inférieure, il octroi des réductions tarifaires sur près de 66 pourcent des lignes tarifaires ;

  • SGP + : disponible pour les « pays vulnérables » impliquant la mise en œuvre des conventions fondamentales sur les droits de l’homme et les droits du travail, le développement durable et la bonne gouvernance ; offre des réductions tarifaires plus importantes sur les même lignes tarifaires

  • prises en considération pour le traitement SGP ; et

  • le Traitement de la Nation la plus Favorisée ou Accord commercial préférentiel pour tous les autres pays.

 

Dans ce contexte, l’APE offre une libéralisation complète des importations vers l’UE en provenance des pays concernés (qu’ils soient ou non PMA), en échange d’une libéralisation  progressive des importations de produits européens vers ces mêmes  pays, couvrant « l’essentiel des échanges. » Pour les PMA africains, dont les produits sont couverts par l’initiative Tout sauf les armes, ceci n’entraîne en principe aucune amélioration de leur accès au marché européen, alors que pour les autres pays africains – qui, pour la plupart, peuvent prétendre au traitement SGP – les améliorations peuvent être significatives, mais sont essentiellement limitées à quelques lignes tarifaires, principalement des produits agricoles européens sensibles aux importations. A l’inverse, au cours de la période de transition, les pays africains doivent abaisser de manière significative le niveau relativement élevé des droits de douane qu’ils appliquent aux exportations européennes, avec des réductions tarifaires couvrant approximativement 80 pourcent de leurs importations en provenance de l’UE. Ceci entraînerait une amélioration importante de l’accès de l’UE aux marchés africains pour une large gamme de produits, allant des céréales et du bétail aux métaux et équipements de transport.

 

Les relations économiques entre l’UE et les pays africains sont, par ailleurs, manifestement caractérisées par des asymétries structurelles profondément ancrées, non seulement en termes de taille économique et de niveau de développement, mais plus fondamentalement, en termes de commerce bilatéral et de pouvoir de négociation relatif. Par exemple, alors que l’UE compte à présent pour près de 20 pourcent (40 pourcent) des exportations totales de marchandises en provenance de la région de l’Afrique de l’Ouest, cette dernière n’achète que 0,1 pourcent (0,6 pourcent) des exportations européennes. En outre, malgré de nombreuses années d’accès préférentiel au marché, les exportations africaines vers l’UE restent essentiellement concentrées sur une gamme étroite de produits principalement de base (pour la période 2010-2012, les carburants représentent, par exemple, en moyenne, 58 pourcent  des exportations de la CEDEAO vers l’UE). Par contre, les exportations européennes vers l’Afrique couvrent une gamme beaucoup plus large de produits, dont essentiellement des produits manufacturés, des biens d’équipement, mais aussi des carburants raffinés et des produits alimentaires.

 

Au vu de ce qui précède, il n’est pas surprenant que le passage à un accord commercial réciproque mais asymétrique, comme l’implique la pleine mise en œuvre des APE, serait susceptible de se traduire par des gains commerciaux mal répartis (CEA, 2014).  En rapport avec le fait que l’UE bénéficierait à terme de l’essentiel des réductions tarifaires, on peut s’attendre à ce que ses gains à l’exportation dépassent ceux de ses partenaires.

Là encore, un accès meilleur aux facteurs de production importés de l’UE peut mener à certains gains pour les régions d’Afrique orientale et australe et d’Afrique de l’Ouest, mais l’expansion de leurs exportations serait essentiellement monopolisée par les non-PMA. Et ceci essentiellement parce que ce sont eux qui verraient une certaine amélioration de leur accès au marché de l’UE (ibidem).  Une telle impulsion serait en outre essentiellement limitée à quelques produits agricoles (produits laitiers, sucre et viande), qui sont actuellement protégés par l’UE. A l’inverse, avec la pleine mise en œuvre des APE, l’Afrique orientale et australe et l’Afrique de l’Ouest verraient une forte augmentation des importations originaires de l’UE, couvrant une large gamme de produits, notamment des biens manufacturés. A cet égard, des simulations suggèrent également que les APE pourraient entraîner un certain détournement des échanges pour l’Afrique, avec des effets négatifs sur le commerce intra-africain. Enfin, on pourrait s’attendre à un impact des APE légèrement négatif sur le revenu réel des pays africains, à la suite d’une baisse des recettes tarifaires, d’une augmentation des importations consécutive à la libéralisation et d’un faible accroissement des exportations, monopolisées essentiellement par les non-PMA africains.

 

 

APE et intégration régionale africaine

 

Deux principaux aspects des APE ont une incidence critique sur l’agenda d’intégration de l’Afrique : la configuration de la négociation et l’impact même des accords. Le premier élément relève essentiellement d’une complication institutionnelle auto-imposée qui résulte de la décision des pays africains de négocier les APE dans cinq blocs différents. En conséquence, à moins d’une coordination étroite des dispositions des APE entre les différents blocs, il sera difficile d’harmoniser les différents accords (APE) et de les aligner avec l’agenda de l’intégration comme défini par le Traité d’Abuja. Cette situation risque en outre d’aggraver les difficultés de longue date concernant le traitement des pays membres de plusieurs CER. Ceci est manifeste, par exemple, dans le contexte du COMESA, une CER qui aspire à établir un marché commun, alors que les pays membres sont répartis entre trois différents blocs dans le cadre des négociations APE (en plus du Partenariat euro-méditerranéen). Pour ce qui est de l’impact des accords APE, il convient d’observer qu’à la fin de la période de transition, les pays africains pourraient bien finir par accorder à un certain nombre d’importations originaires de l’UE, un traitement plus favorable qu’à des produits africains similaires. Par exemple, la liste de libéralisation convenue avec l’Afrique de l’Ouest prévoit que le tarif appliqué, notamment sur les importations céréalières originaires d’Europe serait beaucoup plus faible que ce qui est prévu dans ce cadre du TEC pour les importations en provenance de pays africains ou d’autres pays en dehors de la CEDEAO. En conséquence, à moins que les divers pays africains ne parviennent à réduire les tarifs dans l’ensemble de leurs CER – c’est-à-dire dans le cadre de la ZLEC – les produits européens pourraient finir par évincer les exportations intra-africaines, notamment dans les secteurs de la fabrication, du pétrole et de l’alimentation.

 

Les exportations intra-africaines étant beaucoup plus diversifiées et industrialisées que les exportations de l’Afrique vers le reste du monde (CEA et UA, 2014), les effets potentiellement négatifs des APE sur le commerce intra-africain risquent d’entraver l’agenda de transformation structurelle du continent. A ce stade, on pourrait certes faire valoir que les préférences unilatérales n’ont pas réussi à stimuler la diversification économique en Afrique, mais il est difficile de voir comment les APE, eux-mêmes, pourraient faire mieux en vue de la réalisation du même objectif. Cependant, combiner la conclusion des APE à la mise en place de la ZLEC pourrait compenser les effets négatifs de la première en termes de détournement du commerce intra-africain tout en contribuant toujours de manière significative à l’accroissement nette d’échanges, tant pour l’UE que pour les pays africains.

En outre, des simulations sur l’impact de la ZLEC suggèrent que le secteur manufacturier bénéficierait d’une forte impulsion à la suite de l’élimination des obstacles tarifaires au niveau continental (CEA, CUA et BAD, 2012 ; et Mevel et Karingi, 2012). Certaines études  soulignent également les coûts des échanges disproportionnés comme une des contraintes clés à la performance des exportations tant au sein qu’à l’extérieur de la région (Freund and Rocha, 2010; and Portugal Perez et al. 2012). Dans la même optique, les conclusions de la CEA 2014 suggèrent que les gains commerciaux seraient presque doublés si les APE étaient mis en œuvre et accompagnés dans le cadre de la ZLEC, par des mesures de facilitation des échanges susceptibles de réduire le temps que les marchandises passent dans les ports et au niveau des frontières, et de rendre les procédures douanières deux fois plus efficaces qu’elles ne le sont actuellement.

 

S’attaquer aux coûts des échanges en Afrique permettrait en effet, au continent d’intégrer efficacement le marché mondial et de se connecter plus étroitement aux partenaires globaux, avec des effets positifs importants sur l’industrialisation et le commerce intra-africain. En conséquence, dans un tel scénario, les gains commerciaux bénéficieraient à l’ensemble des pays africains, qu’ils soient PMA ou non-PMA.  L’espace offert par la période de transition aux pays africains dans le cadre des APE devrait donc être utilisé de manière stratégique pour renforcer rapidement l’intégration régionale. 

 

 

Perspectives

 

Les développements ci-dessus sur l’impact des APE montrent que l’échelonnement de la libéralisation des échanges reste primordial pour appuyer l’intégration et l’agenda de transformation de l’Afrique. La réduction des obstacles tarifaires dans les différentes CER africaines avant l’ouverture des marchés aux pays  plus développés est cruciale pour que les producteurs africains soient en mesure d’exploiter les économies d’échelle et l’apprentissage par la pratique qui leur permettront d’être plus compétitifs au niveau international.

Dans ce contexte et à la lumière des évolutions récentes dans les négociations sur les APE, cinq implications politiques se dégagent. En premier lieu, la période de transition des APE devrait être mise à profit pour échelonner de manière appropriée la libéralisation avec l’UE et sur le continent, notamment dans le cadre de la ZLEC. Ceci supposerait l’accélération de la mise en œuvre de la ZLEC pour empêcher le détournement des échanges intra-africains. En second lieu, il est impératif que les pays africains coordonnent la finalisation des négociations sur les APE dans l’ensemble des cinq blocs (et éventuellement avec les pays d’Afrique du Nord, au titre du Partenariat euro-méditerranéen), afin d’harmoniser les diverses dispositions dans la mesure du possible et de minimiser les obstacles à l’agenda d’intégration régionale. En troisième lieu, les pays africains devraient agir de manière concertée avec la Commission de l’Union africaine pour garantir que les dispositions les plus favorables accordées à un bloc par l‘UE seraient également étendues aux autres. En quatrième lieu, les pays africains devraient préserver (et profiter de) l’espace politique ouvert afin d’examiner soigneusement s’ils leur faut souscrire ou non à des dispositions OMC+, sur des questions telles que l’investissement, les droits de propriété intellectuelle, la concurrence et les marchés publics. Enfin, à la lumière des coûts excessivement élevés liés au commerce, les gouvernements devraient mettre en œuvre des mesures de facilitation des échanges  visant à une intégration effective du marché régional, en conformité avec le Plan d’action visant à stimuler le commerce intra- africain.

 

Les auteurs:

SIMON MEVEL est Responsable des Affaires économiques à la Division Intégration régionale et commerce de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA).

GIOVANNI VALENSISI est actuellement Responsable des Affaires  économiques à la Division de  l’Intégration régionale et du commerce de la Commission économique des Nations-Unies pour l’Afrique (CEA).

STEPHEN KARINGI est  Directeur à la Division de l’intégration régionale et du commerce de la CEA.

Article mis en ligne le 05/01/2015

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GESTION DES CONFLITS FRANTALIERS

Les apatrides au Bénin réclament leur nationalité

Une décision la Cour internationale de justice (CIJ) rendue en juillet 2005 a placé plus de 1 000 Béninois dans une situation d’apatrides. Pourtant, la législation du pays et les conventions internationales auxquelles le Bénin est partie ont prévu des dispositions simples à appliquer pour mettre fin à cette aberration.

 

Elias BEHANZIN

« Est-ce parce que nous sommes des peulhs nomades que nous n’avons pas le droit d’être des Béninois ? Les autorités béninoises refuseraient-elles de reconnaître notre nationalité à cause de notre nomadisme », se demande Djoffo Manou, chef d’un des campements les plus peuplés de l’île aux Oiseaux. Comme lui, Aladji Ali et Massamari Amadou, chefs de deux autres campements, s’interrogent. Leur supplique est celle d’un millier de peulhs vivant sur l’île aux Oiseaux. Un havre de 13 km² situé dans la commune de Karimama à quelque 800 km de Cotonou au nord-est du Bénin et au sud-ouest du Niger.  Une île dite aux Oiseaux du fait de la présence de plusieurs espèces ornithologiques en période hivernale. Elle est appelée Kokoro Goungou en langue locale, c’est-à-dire « île du Génie ». La localité a été rattachée à la république du Bénin par un arrêt de la Cour international de justice (CIJ) de La Haye en date du 12 juillet 2005. Une décision en règlement  d’un contentieux frontalier de plusieurs décennies entre le Niger et le Bénin relatif aux îles Lété (rattachée au Niger) et aux Oiseaux. Depuis, des milliers de personnes se sont retrouvées en territoire béninois sans nationalité.

 

Dans leurs campements, hommes, femmes, enfants, jeunes et vieux cohabitent dans des huttes précaires et dans une promiscuité sans pareille. En bons peulhs, leur seule richesse demeure leur bétail. Une fortune qui n’apaise pas les cœurs. Ces populations nomades peinent à améliorer leurs conditions de vie. Oubliés par l’État central du fait de leur situation d’apatrides, les peulhs de l’île aux Oiseaux subissent toutes sortes de brimades en transhumant d’un pays à un autre pour faire paître leurs bêtes dans des zones verdoyantes du Bénin, du Togo, du Niger, du Nigeria et même parfois du Burkina Faso. Ils sont soumis au bon vouloir des autorités frontalières malgré le fait qu’ils parlent les langues locales. Pire est le sort de leurs enfants. Non déclarés à l’état civil, ils n’ont pas accès à l’éducation et mènent une vie d’errance. Les parents les amènent avec eux parcourir de longues distances à la recherche de pâturages.

 

Sur l’île aux oiseaux, tout semble absurde. Les peulhs ne sont pas chez eux. Ils sont autorisés à s’y installer sept mois par an et jouissent d’un droit d’usage précaire. En effet, l’île dépend de la commune de Karimama qui a décidé d’en faire un site touristique. En attendant, l’île manque de tout. Pas même un poste de santé. Les femmes accouchent encore à domicile. Les populations paient la conséquence d’une gestion hasardeuse de situations politico-administratives. Pourtant, le Bénin et le Niger ont accepté la décision rendue par la CIJ conformément à leurs engagements. Cependant, ces deux pays n’ont pris aucune mesure afin de traiter le sort des habitants des territoires ainsi transférés. Ils se sont contentés de délimiter la frontière sur ce secteur du fleuve Niger dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la décision.

 

« Le droit international et le droit interne béninois ont prévu des voies de recours juridiques afin de régler cette question », déclare Alioune Seck de l’unité Apatridie de la Représentation régionale du HCR pour l’Afrique de l’Ouest basée à Dakar. « Depuis décembre 2011, le Bénin est membre de la communauté des États partie à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie. Le Bénin s’est donc engagé à appliquer, dans son ordre juridique interne, les dispositions de cette convention », ajoute-il. Pour Alioune Seck, l’article 2 de la  loi n° 65‐17 du 23/06/65 portant Code de la nationalité dahoméenne applicable aujourd’hui au Bénin pose que « les dispositions relatives à la nationalité contenues dans les traités ou accords internationaux dûment ratifiés (…) s'appliquent même si elles sont contraires aux dispositions de la législation interne (…) ».  Il poursuit en expliquant que, dans son article 10, alinéa 2,  la Convention de 1961 dispose que « l’État contractant auquel un territoire est cédé ou qui acquiert autrement un territoire accorde sa nationalité aux individus qui, sans cela, deviendraient apatrides du fait de la cession ou de l’acquisition ».  Sur la base de cette disposition, conclut Alioune Seck, le Bénin devrait prendre les mesures idoines afin de régler la question de la nationalité des populations vivant sur l’île aux Oiseaux.

ECLAIRAGE

 

Moussa Bello Maman, maire de Karimama

 

« La situation des apatrides fait de la peine »

 

Médecin de formation et ethnopsychiatre consultant pour les hôpitaux de Paris, l’actuel maire de la Commune de Karimama, Moussa Bello Maman, ancien apatride chez lui au Bénin explique. 

 

Propos recueillis à Karimama par E. BEHANZIN

 

Qu’est-ce que ça vous fait de savoir que des milliers de personnes vivant sur le territoire de votre commune sont des apatrides ? 

 

Ça me fait de la peine de rencontrer des personnes qui ne sont de nulle part. Parce que dans le monde d’aujourd’hui, quand on n’a pas un papier d’identité on est comme un animal qui bat la campagne. Ça me fait de la peine parce que moi aussi j’ai vécu la situation. Oui, j’ai été apatride. Je suis venu au monde dans l’île aux Oiseaux. Et dans l’île aux Oiseaux, à l’époque, on était ni du Bénin ni du Niger. On était des apatrides nous aussi.

Quand je suis au Bénin on me traite de Nigérien et quand je suis au Niger, on me dit que je suis Béninois. Et du coup je ne savais pas qui je suis vraiment. Il a fallu attendre l’année 2005 au cours de laquelle, la Cour internationale de justice a dit que l’île aux Oiseaux est une propriété béninoise. Là j’ai dit : « Ah enfin, désormais donc, je suis quelqu’un. »

 

Qu’est-ce que cette décision de la Cour international de Justice a changé pour vous et pour votre famille ? Auriez-vous pu être maire de Karimama sans cette décision qui confirme votre citoyenneté béninoise ?

 

Cela me fait plaisir de savoir qui je suis. Quand on est dans une problématique de double identité ou de sans identité réelle, ça pèse. Cela pèse sur la psychologie de la personne ; ça pèse du fait des regards des autres. Mais cela est aussi un poids moral et social important dans la mesure où j’étais quotidiennement torturé par la question du « que dire à mes enfants ? Ils sont d’où, de quel pays ? » Mes enfants sont qui ? Quoi ? Voici autant de questions qu’on se pose quand on est apatride.

Quant à mon élection au poste de maire (hésitation) ! C’est possible que je sois maire de Karimama en essayant de choisir d’être Béninois. Là n’est pas le problème. Cela ne suffit pas. Il faut que cela soit officiel, reconnu par tous. C’est important que je sache qu’il y a quelque chose qui fait légalement de moi un Béninois au vu et au su de tous. Et vu ainsi, cette problématique devient la réalité de toutes les frontières. Ce n’est pas ma petite personne du maire de Karimama, mais c’est une réalité des populations de toutes nos frontières. Elles ne sont ni d’ici ni de là-bas. Elles sont dans l’entre deux tout comme nos frères immigrés en France.

 

Vous-même et votre administration les évaluez à combien ?  Avez-vous connaissance de pistes ou procédures par lesquelles ces gens peuvent devenir Béninois ?

 

Quand on prend le petit hameau Sabongari que nous avons créé et pour le nombre de personnes réellement recensées, on a pu compter 59 ménages d’au moins 7 membres chacun soit un total d’au moins 413 personnes. Je précise que ce sont les personnes réellement recensées. Parce qu’il y a d’autres qui ne figurent pas dans nos statistiques, qui ont rejoint le premier groupe par vagues successives. Ils sont encore plus nombreux que les autres. Donc si on reprend le décompte aujourd’hui, ils doivent être plus de 800 personnes apatrides.

Quant aux peulhs nomades transhumants vivant sur l’île aux Oiseaux et cherchant à devenir Béninois, ils sont autour de 900 à 1 000 personnes. Je ne peux pas vous en dire plus parce que les peulhs sont des peulhs et des nomades c'est-à-dire que vous pouvez les évaluer à 1 000 aujourd’hui et demain quand vous revenez ils ne seront plus que 700 ou 800 personnes.

Pour ce qui est de leur désir de devenir des Béninois, je pense qu’avec la politique du gouvernement, il existe des dispositions qui disent que quand on fait un certain nombre d’années au Bénin on peut demander à devenir Béninois. Je pense donc que ces gens peuvent devenir Béninois. Ils ont prouvé qu’ils peuvent devenir Béninois. Il y a longtemps qu’ils font ce va-et-vient annuel. Je pense qu’il faut nous aider à leur donner des papiers d’identité. C’est tout à fait logique. Il y a des enfants qui sont nés sur cette île et qui n’ont pas été enregistrés à l’état civil et qui de ce fait, ne sont ni béninois, ni nigériens, ni nigérians. C’est un devoir national, un devoir de nous tous qui s’inscrit, je crois, dans les politiques de citoyenneté prônées par le docteur Thomas Boni Yayi. Ils en ont le droit.

Ancre 1 - Carnet integration

EDUCATION

Le Ministre d’Etat béninois, François Abiola plébiscité Président du Conseil des Ministres de l’EISMV

Le ministre d’Etat béninois, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, le Professeur François Abiola vient d’être plébiscité président du Conseil des Ministres de l’Ecole Inter-Etats des Sciences et Médecines Vétérinaires (Eismv). C’était au cours d’une rencontre statutaire de haut niveau de l’Ecole tenue à Cotonou la semaine dernière…

 

Gérald SETONDJI

C’est ce que certains bons esprits appelleraient un bel accomplissement professionnel et académique exceptionnel. Dans le brouhaha et l’agitation du milieu politique béninois, il a  un profil académique dont la reconnaissance dépasse les frontières de son pays. Le ministre d’Etat béninois, chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, le Professeur François Abiola a été désigné par acclamation au poste de président du Conseil des Ministres de l’Ecole Inter-Etats des Sciences et Médecines Vétérinaires (Eismv). L’histoire entre cette personnalité béninoise et l’école continentale est particulière. En effet, le Professeur Abiola suit les mutations de l’Eismv depuis plusieurs décennies. D’abord en tant qu’étudiant ; ensuite en sa qualité de Professeur émérite et enfin dans les fonctions de directeur de cette Ecole de renommée continentale. Onze années de gestion qui lui ont permis de travailler pour le positionnement scientifique et intellectuel de l’Eismv dans sur le continent africain.

 

« Si l’Eismv a connu un succès, c’est parce qu’il y a eu à un moment donné des hommes de qualité à sa tête, comme le Professeur Abiola. Et nous n’avons pas été déçus » a fait remarquer le président sortant du Conseil des Ministres de l’Eismv, le ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique de la République du Tchad, le Prof Mackaye Hassane Taisso.

Cet hommage rendu au ministre d’Etat béninois lors de la 43ème session ordinaire du Conseil des Ministres (l’équivalent du Conseil d’Administration) de l’Ecole le 12 septembre dernier à Cotonou sera certainement amplifié lors de la cérémonie solennelle de rentrée académique 2014-2015 de l’Eismv basée à Dakar au Sénégal. Le Professeur François Abiola sera ainsi à l’honneur.

 

Maintenir la notoriété de l’Eismv

 

Créée en 1971, l’Eismv est un bel exemple de coopération internationale. A ce jour, elle a formé 1145 vétérinaires. L’établissement universitaire qui est devenue une référence a besoin de consolider son autonomie financière afin de faire face à ses nouveaux défis d’équipement et de modernisation. C’est dans cette perspective que la réunion de Cotonou a spécialement adopté une résolution relative au respect des engagements financiers des Etats vis-à-vis de l’Eismv.

 

Centre d’excellence de médecine vétérinaire, l’Eismv est préoccupée par la propagation du virus Ebola qui sévit actuellement en Afrique. Le virus Ebola est transmis de l’animal à l’homme. Cette réalité a conduit les ministres de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique des 15 pays membres de l’Ecole Inter-Etats des Sciences et Médecines Vétérinaires de Dakar à prendre une résolution pour investir dans la recherche contre le virus. Pour l’heure, le directeur général de l’Eismv, Louis Joseph Pangui exprime la nécessité de disposer d’un personnel qualifié et d’œuvrer pour réduire la propagation de la pathologie. Selon ses propos, l’école régionale doit renforcer l’employabilité et la mobilité académique.

Ancre 2 - Carnet intégration

UEMOA

Voyage sur les routes du racket

Chargés d’assurer la sécurité des personnes et de leurs biens ainsi que de leur libre circulation, des éléments des forces de sécurité les rançonnent lors de leurs déplacements…

 

Alex SANOU

« En venant par la route de Lomé à Dakar en janvier dernier (ndlr : 2014), j’ai payé aux policiers et aux douaniers du Mali plus de 23 000 FCFA », témoigne Marie, une revendeuse de poissons. « Souvent je réclame des reçus aux policiers quand je leur donne de l’argent alors ils se font menaçants », ajoute-t-elle amère. « Ils disent que si je persiste ils vont ordonner au conducteur de me laisser en rade à la frontière », affirme encore la commerçante.

 

« Je ne comprends pas que nos forces de l’ordre qui ont leurs salaires soient encore et toujours tentés d’extorquer de l’argent à nous pauvres citoyens », se désole Amady, conducteur d’autobus rencontré à la gare routière de Dakar où sont stationnés des autocars qui font la navette entre les grandes capitales ouest-africaines. « Nos papiers ont beau être en règle mais les policiers ou les douaniers nous piquent toujours de l’argent », ajoute le quinquagénaire qui conclut : « Nous vivons rarement ces problèmes avec les policiers et les douaniers  togolais »

 

Les rackets et autres formes d’extorsion de fonds opérés par les forces de sécurité sur les citoyens mettent à rude épreuve la libre circulation des personnes et des biens entre les pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa). Les corridors pris en compte actuellement par l’Observatoire des pratiques anormales (Opa) sont : Tema-Ouagadougou, Ouagadougou-Bamako via Koury, Ouagadougou-Bamako via Hérémakono, Lomé-Ouagadougou, Dakar-Bamako, Abidjan-Ouagadougou, Abidjan-Bamako et Cotonou-Niamey. L’Opa qui couvre à ce jour sept corridors de l’Uemoa prévoit ses activités sur l’axe Bissau-Dakar d’ici à la fin 2014. Le tout dernier rapport de l’Observatoire des pratiques anormales le long des corridors, le 24e du genre, fait état d’un « nombre anormalement élevé de postes de contrôle sur l’axe Dakar-Bamako ».

 

L’OPA a été mis en place en 2005 avec l’appui technique et financier de l’Agence américaine pour le développement international(USAID) à travers le projet West Africa Trade Hub. L’objectif est d’instaurer une bonne gouvernance routière sur les principaux axes routiers de l’Afrique de l’Ouest. Lors de la restitution des résultats de son 24e rapport trimestriel début juin 2014 à Bamako, le commissaire de l’Uemoa en charge du développement humain, Seydou Sissouma, a déploré une fois encore le fait. Les rapports de l’Opa révèlent une « persistance du nombre des postes de contrôle routier, des perceptions illicites et des retards induits sur l’ensemble des corridors de l’Union en général et sur les corridors Bamako-Dakar, Abidjan-Bamako et Ouagadougou-Bamako en particulier », souligne Seydou Sissouma. Sur l’axe Ouaga-Bamako via Hérémakono, il existe vingt-neuf (29) postes de contrôle dont vingt-deux (22) postes en dehors des frontières tandis que sur le corridor Lomé-Ouagadougou, l’on dénombre six (6) postes de contrôle.

 

 

Les goulots d’étranglements 

 

Le corridor Bamako-Ouagadougou reste celui où les perceptions illicites sont les plus élevées selon la constante qui se dégage des différents rapports depuis 2005. La frontière de Koury au Mali devient la frontière « la plus tracassière avec plus de 8 000 FCFA de prélèvements illicites par voyage alors que la frontière de Malanville au Bénin est la moins chère dans la sous-région avec 400 F CFA par passage ».

Le corridor Cotonou-Niamey comporte la plus petite densité de contrôles avec douze (12) contrôles en moyenne le long des 1 041 km. L’axe sur lequel les arrêts sont les plus fréquents reste le corridor Bamako-Ouagadougou avec deux fois plus de contrôles que sur le corridor Cotonou-Niamey pour une distance similaire. Comme pour le nombre de contrôles, le Mali, suivi du Niger, sont les plus mauvais élèves concernant les perceptions illicites.

D’après le rapport 2013, le Bénin et le Niger sont les pays où les harcèlements des chauffeurs sont les plus importants. Le Mali, est, selon la même source, le pays où les pratiques anormales sur les routes sont les pires de la région.

Une étude menée en 2008 indique que « sur une année de trafic en provenance des ports de Dakar, d'Abidjan, d'Accra, de Lomé et de Cotonou et à destination du Burkina Faso, du Mali et du Niger, 2 062 500 000 F CFA de frais supplémentaires sont perdus à raison de 2 000 francs par barrage routier ».

 

Togo, le pays le moins tracassier

 

Le 24e rapport fait état de quelques améliorations depuis un an. Au cours du deuxième trimestre 2013, les prélèvements illicites ont diminué de 18 % et les  retards et les contrôles ont baissé respectivement de 30 % à 17 %. Au Sénégal, les contrôles ont baissé de 30 % durant le trimestre. Le rapport du premier trimestre 2013 indique qu’au Sénégal, les prélèvements illicites ont diminué de 7 % alors que les retards et les contrôles ont augmenté de 13 % et de 5 % respectivement.

Une fois encore les corridors Lomé-Ouagadougou et Tema-Ouagadougou sont les lieux où ces perceptions restent les moins élevés, les prélèvements frauduleux y sont les plus limités de la région. D’après les rapports successifs, le Togo reste le pays le moins tracassier. Depuis 2011, ce pays le premier de la classe en termes de liberté de circulation vue sous l’angle du nombre de postes de contrôle et de perceptions illicites. Néanmoins, les rapporteurs révèlent que la levée de certains postes de contrôle en territoire togolais a favorisé le non-respect des normes de sécurité par les usagers de la route.

Les auteurs des rapports indiquent, par ailleurs, que depuis 2011 la Côte d’Ivoire n’a pas connu d’amélioration majeure en matière de pratiques anormales sur les routes. Le nombre des contrôles ivoiriens a augmenté. Le Burkina Faso n’a pas non plus connu d’amélioration. Le Ghana, pays non-membre de l’Uemoa mais membre de la Cedeao reste un pays où les perceptions illicites sont qualifiées de « modestes ».

Les numéros verts mis à disposition des citoyens par les différentes administrations ne semblent pas connus des usagers des routes de l’Afrique de   l’Ouest. Une telle situation est peu surprenante d’autant que très peu d’information et de sensibilisation sont organisées à ce propos à l’endroit des citoyens.

 

Un grand travail reste à abattre à tous les niveaux et par tous les acteurs à savoir la douane, la police, la gendarmerie, les eaux et forêts, les services de santé et phytosanitaires les chargeurs, les chambres de commerce et d’industrie mais aussi les associations des transporteurs, des conducteurs, les commerçants et la société civile, entre autres.

Réquisitoire de Désiré Kadré Ouédraogo, président de la Commission de la Cedeao

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) qui est un regroupement de quinze (15) pays (dont les huit de l’Uemoa) connaît les mêmes problèmes du racket des populations lors de leurs déplacements inter-États. Le président de la Commission de la Cedeao, le Burkinabé Désiré Kadré Ouédraogo, a dénoncé ce fléau début juillet, à Ouagadougou à l’occasion d’une conférence consacrée aux difficultés de circulation dans l’espace communautaire. Pour lui, l’accomplissement du marché commun dans cet espace géographique  est primordial pour la « réalisation de la vision stratégique à l'horizon 2020 fondée sur l'émergence d'une Cedeao des peuples ».

 

Se fondant sur une récente étude de la Direction de la libre circulation de la Commission de la Cedeao, Désiré Ouédraogo a révélé qu'« en moyenne 36 % des personnes traversant les frontières dans la Communauté ont beau posséder des documents de voyage valides, cela ne les dispense pas pour autant des rackets et prélèvements illicites opérés ici et là ». De même, « 91 % des migrants vers les différents pays de la Cedeao se plaignent du coût élevé d'obtention des documents de voyage requis, tandis que 77 % de ces migrants payent des pots-de-vin aux hommes en uniformes à chaque passage de frontière ».

NUMEROS  VERTS POUR DENONCER LES RACKETS SUR LES ROUTES

Bénin :                        +229 81 00 00 01

                                   +229 81 00 00 02

 

Burkina Faso : Plainte contre la police : 10 10

 

Côte d’Ivoire : Plainte contre la police : 100

                                   +225 22446240 

                                      ou

Unité contre le Racket :   +225 01 72 36 72

 

Ghana :           Police :     +233 (0) 30 277 64 35

                         Douane : +233 (0) 28 953 39 90

                         Police des Frontières : +233 (0) 955 60 00 00

 

Mali :              Plainte contre un agent de la police :   +223 66 71 17 12

                        Plainte contre un agent de la Douane : +223 79 03 20 33

 

Niger :            08 00 11 11

 

Sénégal :        Plainte contre un agent de la Police : 17 ou 800 80 44 44

                       Plainte contre un agent de la Douane : 800 00 20 20

 

Togo :            Plainte contre un agent de la gendarmerie : 172

                       Plainte contre un agent de la police : 161 ou 117

Article mis en ligne le 08/08/2014

Ancre 3 - Carnet intégration

Education dans l’espace UEMOA

L’inégalité des droits freine la mobilité des étudiants

Sept ans après la prise de la directive portant égalité de traitement des étudiants ressortissants de l’UEMOA, les Etats semblent marquer le pas. Devant de ce constat de lenteur, les premiers responsables de la Commission redoublent d’ardeur pour emmener les 5 pays retardataires à se mettre à jour.

 

T. KONE

Après avoir fait un Master en biologie moléculaire à l’Université de Ouagadougou, dans les mêmes conditions que ses camarades burkinabè, la béninoise Théodora Zohoncon poursuit ses études pour obtenir le doctorat. « J’ai eu la chance que le Burkina applique le principe d’égalité de traitement. C’est le seul pays de la sous-région qui dispose du plateau technique adéquat et le corps-enseignant qualifié pour la formation que je suis. Le fait que les frais d’inscription et de formation soient les mêmes pour les ressortissants de l’UEMOA, nous  a été d’une très grande aide.», apprécie la jeune doctorante.

 

La directive n°01/2005/CM/UEMOA du 16 septembre 2005 instruit les huit Etats membres de l’Union à traiter les étudiants ressortissants de l’espace communautaire  de façon égalitaire, dans la détermination des conditions et des droits d’accès aux institutions publiques d’enseignement supérieur. La mise en œuvre de ce texte devait intervenir depuis le 31 décembre 2007. Mais jusqu’en février 2014, seulement 3 pays sont en règle. Il s’agit du Burkina, du Niger et de Guinée-Bissau qui « ont adopté des textes formels pour appliquer la Directive et donné des instructions pour son application dans les institutions de formation », confirme la direction de l’enseignement supérieur au département du développement humain à la Commission de l’UEMOA.

S’agissant des autres Etats membres qui trainent le pas, notamment la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Sénégal, des engagements sont pris, pour profiter des réformes en cours et insérer dans les textes organisationnels des établissements, le principe du traitement

égalitaire des ressortissants de l’Union. C’est ce qu’indiquent les rapports des missions de suivi menées par le département en charge du dossier. Les raisons fournies pour expliquer le retard sont à mettre au compte des difficultés financières. Les universités publiques rechignent à lâcher leur principale source d’entrées de fonds.

 

« Dans chacun des pays, les frais d’inscriptions majorés payés par les étudiants provenant d’autres pays de l’Union et des pays non membres (souvent 20 à 40 fois plus élevés que ceux des nationaux) constituent l’une des ressources essentielles de l’institution, eu égard aux allocations budgétaires gouvernementales limitées », confie-le Pr. Bréhima Tounkara, le directeur de l’enseignement supérieur. Jusqu’à présent, l’insuffisance de ressources propres qui a poussé les pays à progressivement exiger des étudiants étrangers des frais d’inscription nettement plus élevés pour répondre aux besoins de fonctionnement des universités n’a pas été comblée.

 

A la Commission de l’UEMOA, on réitère que la veille sur l’application du principe de l’égalité de traitement reste une priorité. Car le secteur de l’enseignement supérieur fait l’objet d’une attention particulière de la part des premières autorités de l’Union. Aussi multiplient-elles les appuis structurels en vue d’encourager les Etats à appliquer les textes communautaires initiés dans le domaine. Ces dernières années, un soutien conséquent est apporté aux universités pour la réforme Licence, Master Doctorat et pour l’utilisation des TIC. « Les fonds d’appui à la recherche et la formation des formateurs mis en œuvre en faveur des pays membres, constituent des incitations auxquelles les Etats membres sont de plus en plus sensibles pour consentir des sacrifices en vue du renforcement de la solidarité au sein de l’Union », selon M. Tounkara.

 

Dans les huit pays de l’Union, exception faite du Sénégal, les statistiques fournies par la Commission sur la mobilité des étudiants montrent que pour chaque pays, le nombre de nationaux étudiant en dehors du pays d’origine est nettement supérieur au nombre d’étudiants ressortissants des autres pays de l’Union inscrits dans ce pays. Cet état de chose est mis en avant dans le plaidoyer que mènent régulièrement les responsables de la Commission en faveur du respect des règles importantes de l’intégration régionale.

Situation de mobilité des étudiants dans l’espace
communautaire entre 2008/2009 (source UEMOA)

Article mis en ligne le 08/08/2014

NEPAD

Des projets en panne de financement

Cinq chefs d’État en croisade pour remobiliser le continent autour du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique. Leur défi : le financement des projets.

 

Alex SANOU

L’Afrique a mal dans ses infrastructures. Le gap à combler est colossal et le coût tout aussi gigantesque. Mais c’est là le prix de son avenir. Le continent doit investir 93 milliards de dollars par an dans les infrastructures pour « soutenir sa forte croissance économique », estime le Fonds monétaire international (Fmi). En effet, « des infrastructures de haute qualité peuvent être susceptibles d’attirer les investisseurs étrangers ». Et, début juin 2014, la directrice générale du Fmi, Christine Lagarde, déclarait : « Seulement 16 % des routes d’Afrique sont goudronnées, contre 85 % en Asie du Sud. Ces lacunes représentent des coûts énormes pour les entreprises et pour les populations. »

 

Le défi semble à la hauteur des ambitions des dirigeants africains. « Nous avons identifié nos besoins dans le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA), pour 368 milliards de dollars sur la période 2012-2040, avec un volet prioritaire de 51 projets et programmes, pour un coût de 68 milliards de dollars pour la séquence2012-2020 », a affirmé le président sénégalais, Macky Sall s’adressant mi-juin à un public convaincu. C’était à Dakar.

 

Le président du Sénégal s’était retrouvé avec ses pairs Yayi Boni du Bénin, Goodluck Jonathan du Nigéria, Ibrahim Boubacar Keita pour remobiliser le continent autour du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad). À leurs côtés, la présidente de la Commission de l’Union africaine, la Sud-Africaine Nkosazana Dlamini Zuma, le président de la Banque africaine de développement, le Rwandais Donald Kaberuka et évidemment Ibrahim Assane Mayaki, secrétaire exécutif de l'Agence du Nepad.

 

Le Nepad ressemble à un concentré de projets ambitieux. Ils portent essentiellement sur les transports, l’agriculture, l’énergie, les technologies de l’Information et de la  communication ou encore l’accès à l’eau. Il s’agit de projets tels que le corridor littoral Abidjan-Lagos, le gazoduc Algérie-Nigeria, la ligne de communication Zambie-Tanzanie-Kenya ou encore le projet de corridor ferroviaire et routier Douala-Bangui-Ndjamena.

 

En matière d’accès à l’eau et à l’assainissement par exemple, dans les pays africains, environ 327 millions de personnes n’ont pas accès au liquide précieux. Or les Objectifs du millénaire pour le développement visent à réduire de 50 % la population n'ayant pas accès à l'eau, d’ici à 2015. En matière d’énergie, la majorité des pays africains connaissent des déficits énormes préjudiciables à leur développement.

 

Doté d’un Programme de développement des infrastructures en Afrique (Pida) et d’un Plan d’action prioritaire (Pap) pour la mise en œuvre dudit programme, l’Afrique va-t-elle enfin décider de son destin ? Les projets retenus à ce jour concernent le domaine de l’énergie qui mobilise 59 % des financements, du transport pour 38 %, de l’eau 2 % et des technologies de l’information et de la communication (Tic) pour 1 %. Quid des difficultés de financements ?

 

« Nous voulons, en effet, rompre avec les modèles de financement classiques pour atténuer la dépendance du continent à l’égard de l’extérieur, compte tenu surtout du reflux de l’aide publique au développement et de la volatilité des marchés de capitaux », prônait récemment le président sénégalais, Macky Sall qui veut toutefois intéresser tant le privé africain qu’étranger. D’après lui, «il faut comprendre que l’économie africaine peut parfaitement générer plus du double  voire, du triple des 368 milliards (le budget prévisionnel recherché à ce jour) ».

 

L’heure n’est plus au pessimisme. Les leaders africains n’ont de cesse de soutenir que « l’Afrique est une terre d’opportunités aujourd’hui », et qu’il faudra à l’avenir, compter avec le continent dont le taux de croissance oscille autour de 6 %. Pour le président de la Banque africaine de développement, le Rwandais Donald Kaberuka le secteur privé africain doit « s’engager davantage  pour le financement des projets choisis par le sommet comme étant le premier pas  vers la réalisation de ces projets d’ici à 2020 ».

 

C’est certainement dans le but d’apporter sa propre pierre au financement des projets d’infrastructures que la BAD a institué, à l’occasion de ses 50 ans, le Fonds Afrique 50. Au moins 100 milliards de dollars devraient tomber dans l’escarcelle de la banque continentale pour la bonne cause.

Les 16 projets prioritaires d’infrastructures

01. Projet Hydroélectrique de Ruzizi III - rivière et frontière RDC/Rwanda. Coût : 600 millions de dollars. Ce projet devrait fournir de l’électricité à environ 107 millions de personnes.

02. Extension du Port de Dar es Salam - Après Mombasa (Kenya), ce port va servir de seconde passerelle la plus importante pour le commerce régional en Afrique de l’Est. D’un coût de 384 millions de dollars, il va permettre d’augmenter le débit des cargaisons, une meilleure gestion de plus grands navires dans le terminal.

03.  Route Serenge - Nakonde (T2) en Zambie - Longue de 615 kilomètres, elle est évaluée à 674 millions de dollars. Elle est censée contribuer à réduire le coût du transport routier sur l'axe des corridors Nord-Sud de Dar-es-Salaam et réduire les pertes dues aux accidents pour le transport de passagers et de marchandises.

04.  Gazoduc Nigeria – Algérie - Il pourra permettre à l’Afrique de contribuer fortement au marché continental et mondial de l’énergie à travers de gaz naturel. Ce projet encore appelé Trans - Sahara Gas Pipeline (TSGP) contribuera également à l’intégration des économies de la sous-région. Compte tenu de la longueur de 4 400 km, le coût du gazoduc est considéré raisonnable par rapport à l'option de GNL en tenant compte des pertes de gaz estimées à 15 - 18 %, au cours du processus de liquéfaction. Il y a deux options pour la taille de la canalisation, 48 ou 56 pouces de diamètre. Avec l'option de 48 pouces, le TSGP atteindra une capacité de 30 milliards de mètres cubes de gaz naturel par an.

05. Modernisation de la Ligne Ferroviaire Dakar - Bamako

06. Projet Hydroélectrique de Sambangalou – Barrage multifonctionnel avec une capacité de production énergétique de 402 Gigawatts/heure par an. Il coûtera 1,108 milliard de dollars, et bénéficiera au Sénégal, à la Gambie, à la Guinée et à la Guinée Bissau pour une énergie renouvelable moins chère.

07. Corridor Littoral Abidjan - Lagos - Long de 1 028 km, il concentrerait les trois quarts du trafic  routier ouest-africain en termes de circulation des  personnes, des biens et des services.

08.  Fibre Optique Terrestre TIC Lusaka – Lilongwe - (longueur : 2 206 km). Elle  entraînera l’utilisation accrue des réseaux à très larges bandes, et créera des opportunités pour le commerce électronique.

09.  Ligne de Communication Zambie - Tanzanie - Kenya - Les pays de l’Afrique australe et de l’Est, voient plus que jamais en ce projet une partie de la solution au problème parallèle du tempo augmenté envisagé dans le développement d’une nouvelle génération d’électricité dans presque tous les pays de cette partie de l’Afrique. Le projet devrait renforcer la coopération régionale. Cela devrait encourager plus de commercialisation d’énergie entre l’Afrique australe et de l’Est.

10. Corridor de Communication de l’Afrique du Nord - Ligne de transmission de 2 700 kilomètres dotée d’une capacité de 4 500 mégawatts, partant du Maroc en Egypte, en passant par l’Algérie, la Tunisie et la Libye.

11. Projets Routier et Ferroviaire Abidjan- Ouagadougou - La modernisation de 1 200 kilomètres de tronçon à partir de la ligne de chemin de fer existant. Il devrait être bénéfique pour plusieurs pays, et contribuer à l’accélération de l’intégration régionale.

12. Projet de Corridor Ferroviaire et Routier Douala - Bangui - Ndjamena

13. Mise à jour de la Route Kampala - Jinja - Longueur ! 75 km de route avec chaussée à deux voies

14. Projet Routier Juba - Torit - Kapoeta - Nadapal- Eldoret (365 km) - Il va améliorer la connectivité entre les États et la région à travers la modernisation d’un tronçon routier prioritaire le long du corridor national et international essentiel.

15. Projet Hydroélectrique de Batoka Gorge - Coût : 4 milliards de dollars. Il  concerne le Zimbabwe et la Zambie. Le projet produira l’énergie renouvelable, et permettra de réduire les coupures d’électricité et les délestages dans ces pays.

16. Projet de Pont Routier et Ferroviaire Brazzaville - Kinshasa et Chemins de Fer Kinshasa-Illebo : Il va accélérer l’intégration régionale, accroître l’efficacité et la capacité du secteur des transports, et favoriser la croissance du commerce régional.

 

Article mis en ligne le 08/08/2014

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